Le présent d'hier et de demain

Réflexions sur les archives et surtout l'archivistique à l'ère du numérique (et parfois même un peu de poésie) – Anouk Dunant Gonzenbach

Archiviste : pourquoi j’aime ma profession

par Anouk Dunant Gonzenbach

J’ai essayé l’autre jour de formuler pourquoi après 12 ans d’expérience la profession d’archiviste me plaît – toujours- autant. Il faut dire qu’après tout ce temps, il y a encore beaucoup d’amis qui ont du mal à comprendre. Pas très glamour, ce qu’on fait ? Je livre ici le résultat de cette petite réflexion, en quatre mots-clés. Alors, pourquoi ?

Tout d’abord par émerveillement. A l’Université, j’ai eu la chance de choisir des séminaires d’histoire qui avaient lieu aux Archives cantonales. Je crois que c’est là que j’ai succombé à l’attrait de ces documents qui ont traversé les siècles. Un séminaire de paléographie plus tard, donné par une enseignante formidable qui nous a permis de lire les écritures des 16e et 17e siècles comme si on lisait le journal, j’ai pu me lancer pour mon mémoire dans les sources de l’Eglise de Genève. Déchiffrer la signature de Jean Calvin à côté de l’inscription d’un baptême – ohmondieu, il a tenu en main ce même registre- est quand même juste magique. Oui, souhait de rester proche de ces documents. De les conserver, de les mettre en valeur et de les faire connaître. De casser une certaine image de vieux papiers pleins de poussière dans une cave sombre : venez, les gens, découvrir les chartes médiévales et le contrat d’apprentissage de Jean-Jacques Rousseau. Tout de suite, le respect.

Par défi ensuite. Il y avait tant à faire, déjà avant l’arrivée du numérique. Je pense que ce n’est pas tellement un secret que les archivistes issus d’une licence en histoire se sont formés sur le terrain et que contrairement à nos amis bibliothécaires nous avons été moyennement sensibilisés à la normalisation qu’il y a beaucoup à faire dans une institution d’archives: des politiques à définir, l’adaptation aux normes archivistiques, dont certaines sont relativement récentes, des projets d’indexation à implémenter, des calendriers de conservation et des plans de classement à mettre en place du côté du records management, les mesures de conservation préventive. Est arrivé ensuite le côté geek de la chose avec les possibilités offertes par le numérique : la diffusion des inventaires, la numérisation des sources et leur accès en ligne. Et depuis 3-4 ans, affronter le défi majeur de l’archivage électronique. Cela nous demande d’acquérir de nouvelles connaissances et de nous intégrer dans le monde des informaticiens, ce que je trouve passionnant et très enrichissant. J’aime les projets et c’est un métier qui en propose carrément plus que les ressources disponibles ne permettent de le faire (bon, on les met, ces inventaires, sur la plateforme Opendata de la Confédération ?).

Par conviction. D’abord, les gros doutes. Ce métier est-il utile ? Bien sûr, être archiviste, cela ne fait de mal à personne et c’est sans doute mieux que de travailler pour un fabricant d’armes ; mais ne serait-il pas plus concret de mettre de l’énergie au service de la Croix-Rouge, d’une ONG, de projets de développement durable ? Et puis, la foi: les archives sont indispensables. Elles sont garantes d’un état de droit et peuvent être appelées à justifier les droits des citoyens et des institutions. Ce n’est pas pour rien que les archives sont une menace pour les régimes totalitaires, ce qui est très bien illustré dans cet extrait de 1984 : «Jour par jour, et presque minute par minute, le passé était mis à jour. On pouvait ainsi prouver, avec documents à l’appui, que les prédications faites par le Parti s’étaient trouvées vérifiées.[…] L’Histoire tout entière était un palimpseste gratté et réécrit aussi souvent que c’était nécessaire. […] la plus grande section du Commissariat aux Archives, bien plus grande que celle où travaillait Winston, était simplement composée de gens dont la tâche état de rechercher et rassembler toutes les copies de livres, de journaux et autres documents qui avaient été remplacées et qui devaient être détruites». La Déclaration universelle des archives, adoptée en 2011 par l’Unesco, souligne le rôle essentiel que jouent les archives dans la transparence administrative, la responsabilité démocratique, la protection des droits des citoyens et la construction de la mémoire individuelle et collective. Sans document d’état civil, je ne suis pas un citoyen. Sans le registre foncier, je n’ai pas de bien. Les archives ne sont pas un gadget pour quelques historiens sont vraiment l’un des piliers d’une démocratie. Dans cette optique, les projets d’archivage numérique sont indispensables. En effet, il faut préparer sans erreur possible la conservation de ces documents lorsqu’ils seront entièrement dématérialisés. On ne va pas tomber dans le pathos, non plus, hein, mais là c’est vraiment sérieux.

Pour la diversité. Elle contient mille facettes, cette profession. Il y a le contact avec les chercheurs, que nous orientons dans les fonds pertinents. Les recherches historiques pour répondre aux diverses questions sur l’origine des noms de rue, la biographie d’un savant pas trop connu, un bâtiment, une famille, certaines fois on se prend vraiment pour des détectives du passé. Du mouvement, puisqu’évidemment les lecteurs, qui se sont donnés le mot, viennent tous au même moment avec les pires questions compliquées le jour où le monte-charge est en panne. Le document inédit sur lequel on tombe par hasard. Les journées du patrimoine, lors desquelles les Archives font le plein (ce qui contredit quand-même le mépris du public pour la poussière). Le petit update qu’on s’accorde sur telle période historique qui nous échappe un peu. La fascination pour un fonds non versé que l’on découvre dans une tour de la Cathédrale. La collaboration avec les restaurateurs (vous êtes vraiment sûrs, là, qu’il faut immerger dans le bassin cette feuille manuscrite du 16e siècle ?). L’organisation de forums qui rassemble la communauté professionnelle de la région. Et les réseaux sociaux, hein, on s’y met ? La refonte du site web. La présentation des nouvelles acquisitions de la bibliothèque. L’exposition à monter (de la rédaction des légendes au nettoyage des vitrines). La curiosité n’est pas près d’être rassasiée, et je crois que cet inventaire ne va jamais s’arrêter…

Et puis, en plus de tout cela, une ouverture sur une thématique peut-être plus de société, celle de l’éducation numérique. En tant que professionnels de l’information, je pense que nous avons un rôle à jouer là-dedans (voir le petit cri du cœur précédent ). Non, ce n’est pas parce que ce n’est pas dans Google que ça n’existe pas. Oui, c’est écrit là sur internet, mais ça ne veut pas forcément dire que c’est juste. Les musées rajeunissent leur public, je crois profondément que nous pouvons aussi inscrire la visite d’une institution d’archives dans le programme scolaire au même titre que la visite d’un musée ou d’un Hôtel-de-Ville. Les enfants sont sensibles aux vieux documents, cela vaut la peine de leur montrer où se trouve une partie du savoir.

Pour toutes ces raisons, et bien plus, j’aime ma profession. Même si je ne pense pas que ce soit une vocation, comme a voulu me l’inculquer la directrice qui m’a engagée à l’époque, m’assurant que j’entrais en religion – il faut dire que les réunions de service étaient alors nommées « chapîtres généraux ».

Et, truffe au chocolat sur le gâteau, les archivistes sont très sympa et en majorité passionnés par ce qu’ils font. Et en plus, toujours partants pour partager une bière après l’effort, j’ai pu constater grâce à Twitter que cette caractéristique est largement confirmée. Partager un Orval sur une terrasse de Louvain-la-Neuve, un grand moment.

Citation: George Orwell, 1984, Folio Gallimard, 2001, pp. 62-63.

Outils concrets pour archivistes et RM: le cadre de référence RM

Le cadre de référence Records Management de l’Association des archivistes suisses (AAS)

Le Cadre de référence RM, développé par le groupe Records Management & Archivage définitif de l’Association des Archivistes suisses, revêt la forme d’une boîte à outils (Baukasten RM en allemand) mettant à disposition de la communauté des modèles de documents rédigés par différentes organisations et institutions.

Structuré sur la base de la norme ISO 15489, le site propose une approche théorique en trois parties : la phase d’analyse, la phase de conception et la phase de réalisation. Les processus appartenant à chaque phase sont analysés et décrits.

Le point fort de ce cadre de référence est la mise à disposition de documents produits par différentes institutions cantonales d’archives, par les Archives fédérales suisses et par des entreprises privées. Selon leur objet, ces documents sont rattachés à l’une au l’autre phase de RM. Certains de ces documents ne sont pas publiés et sont donc disponibles uniquement sur ce site, qui réunit ainsi une grande richesse de matériel.

Chaque institution ou organisation est invitée à contribuer à ce Cadre de référence en proposant ses propres documents, par le biais d’un formulaire.

http://www.vsa-aas.org/fr/aktivitaet/gt-records-management/rm-baukasten/

Métadonnées intégrées aux images numérisées, partie 3: les conditions d’utilisation des images

par Xavier Ciana, Emmanuel Ducry et Anouk Dunant Gonzenbach

Parmi les métadonnées internes aux images se trouve notamment un certain nombre de champs (IPTC ou XMP) relatifs aux conditions d’utilisation, à savoir le droit d’utilisation qui est mis sur les images. Il faut signaler que techniquement, quel que soit le champ utilisé pour signaler des conditions d’utilisation, il n’est pas compliqué de retirer ou de modifier les métadonnées d’une image. Une métadonnée n’est donc en aucun cas une mesure technique entravant l’utilisation, la copie ou encore un filigrane numérique (watermark). Les métadonnées ne sont pas un outil destiné à limiter l’utilisation mais un moyen d’informer le public sur le statut légal d’une image.

1)    Les outils à disposition sont les suivants:

Le Copyright  
Le Copyright, souvent indiqué par le symbole ©, est dans les pays de common law (droit commun) l’ensemble des prérogatives exclusives dont dispose une personne physique ou morale sur une œuvre de l’esprit originale. Il désigne donc un ensemble de lois, en application notamment dans les pays du Commonwealth des Nations et aux États-Unis, qui diffère du droit d’auteur appliqué dans les pays de droit civil (tels que la France ou la Belgique). Bien que les deux corpus de lois tendent à se rejoindre sur la forme grâce à l’harmonisation internationale opérée par la convention de Berne, ils diffèrent notablement sur le fond. Le copyright relève plus d’une logique économique et accorde un droit moral restreint, là où le droit d’auteur assure un droit moral fort en s’appuyant sur le lien entre l’auteur et son œuvre.
Comme cet article concerne les images d’une institution conservant des fonds relevant du domaine public, nous n’aborderons pas plus avant dans cet article la notion du Copyright.

•    Les licences Creatives Commons
Le Creative Commons (CC) est une organisation à but non lucratif dont le but est de proposer une solution alternative légale aux personnes souhaitant libérer leurs œuvres des droits de propriété intellectuelle standards de leur pays, jugés trop restrictifs. L’organisation a créé plusieurs licences, connues sous le nom de licences Creative Commons (définition Wikipedia ).
Placer une image ou une œuvre sous l’égide d’une licence Creative Commons nécessite de disposer des droits liés à celle-ci. Une institution conservant des images sur lesquelles elle ne dispose pas du droit d’auteur ne pourra pas recourir à cette solution.
Si l’on ne veut pas d’utilisation commerciale des images, il est alors possible de recourir aux Creative Commons pour définir à l’aide de quelques options très simples la solution désirée. CC-BY-NC implique par exemple de citer la source de l’image et de ne pas en faire d’utilisation commerciale. CC-BY-SA-NC revient au même, si ce n’est que l’on ajoute le devoir de partager l’image sous les mêmes conditions même en cas de transformation.

•    La Public Domain Mark
La Public Domain Mark  est un instrument de signalisation, créé par Creative Commons, pour « étiqueter » le domaine public en ligne. Elle a été conçue spécifiquement pour permettre aux institutions culturelles d’indiquer clairement à leurs usagers qu’une œuvre qu’elles diffusent appartient au domaine public. La marque du domaine public certifie ce statut juridique et permet donc aux internautes de réutiliser les œuvres numérisées librement en ce qui concerne le droit d’auteur et les droits voisins, y compris à des fins commerciales. Attention toutefois, la Public Domain Mark ne s’applique qu’à l’œuvre et pas à ses métadonnées. De plus, elle n’implique en rien l’absence de droits autres qui viendraient encapsuler le domaine public, tel que le droit des bases de données, ou des clauses contractuelles dans le cas d’un partenariat public-privé. La Public Domain Mark est par exemple utilisée par la Bibliothèque Sainte-Geneviève pour diffuser ses collections en version numérique sur le web, par l’Université de Clermont-Ferrand pour certains de ses fonds, ou la plate-forme MediHAL du CNRS où elle est proposée comme option aux chercheurs .

•    La licence Creatives Commons zéro (CC0)
La Creative Commons Zéro (CC0)  est un instrument développé par Creative Commons pour permettre aux titulaires de droits sur un objet de renoncer à leurs prérogatives pour le verser volontairement au domaine public et en autoriser la réutilisation sans aucune restriction. CC0 n’a pas été conçu à l’origine pour la diffusion d’œuvres numérisées qui appartiendraient déjà au domaine public. Il s’agissait plutôt de donner un moyen aux créateurs pour placer leurs œuvres par anticipation dans le domaine public de leur vivant, sans attendre l’expiration des droits. Les institutions culturelles peuvent aussi se tourner vers cet instrument pour la diffusion du domaine public numérisé.  C’est par exemple ce que fait le Rijksmuseum d’Amsterdam. Ce dernier dispose en effet d’un espace sur son site, intitulé le Rijksstudio, sur lequel il propose plus de 125 000 chef-d’œuvres numérisés, en incitant explicitement les visiteurs à les réutiliser à leur propres fins. La licence CC0 a quelques avantages sur la Public Mark Domain. Elle peut s’appliquer aux métadonnées qui accompagnent l’œuvre. En outre, sa formulation fait qu’en renonçant à “tous les droits”, l’institution renonce donc à ces droits, tel que le droit des bases de données, qui vient parfois encapsuler le domaine public. On s’assure ainsi que l’image est effectivement libre de tous droits. Elle peut être récupérée à n’importe quelle fin, y compris commerciale. Cette option permet donc une diffusion large des images. On peut l’assortir de recommandations (code de bonne conduite, Fair Use) telles que : citer la source, de pas utiliser les images de manière offensive ou obscène, à l’exemple du  RijksMuseum  (voir en bas “Fair Use”).

2)    Quelle protection mettre sur nos images? Nos réflexions
Une institution qui diffuse des images numérisées en ligne doit en premier lieu définir sa politique d’accès aux images. Dans le cas présent, l’approche visait à répondre à deux objectifs pragmatiques :

–    faciliter l’utilisation des images par le grand public
–    limiter le travail administratif pour l’institution

Du point de vue juridique, en Suisse, les lois, ordonnances et autres actes officiels, décisions, procès-verbaux et rapports émanant des autorités ou des administrations publiques ne sont pas protégés, car ils sont destinées à être publiées (Loi fédérale sur le droit d’auteur et les droits voisins, LDA, du 9 octobre 1992, source: Thomas Fischer, avocat, MLaw, Conférence à l’intention des archivistes sur les droits d’auteur, mai 2012).  On ne peut donc pas mettre de Copyright ou poser par défaut des mentions restrictives de l’utilisation des images de ces documents.

Du point de vue philosophique, pour les images qui ne sont pas concernées par la législation ci-dessus, la question est la suivante: faut-il empêcher toute forme de réutilisation, y compris des réutilisations légitimes, et tenter de restreindre les droits, ou au contraire laisser une utilisation libre ? La question sous-tendue est: faut-il accepter que l’on puisse faire de l’argent avec des images / données publiques?
Dans notre cas concret, à savoir la mise en ligne d’images conservées dans une institution publique cantonale d’archives, empêcher toute forme de réutilisation est trop restrictif à notre sens car cela bloque par exemple les usages pédagogiques et de recherche et cela interdit également de reprendre les images pour illustrer un document, un blog ou un site. Cela est également un peu vain car en général les institutions publiques ne disposent pas des moyens nécessaires pour vérifier si les limitations sont respectées. De plus, dans le cadre de notre projet, les images sont mises en ligne pour des raisons de rapidité d’accès en format JPEG, ce qui limite la qualité d’impression et les possibilités de publication (ouvrages, affiches). L’argument de ne pas vendre des informations qui ont été financées par les impôts a également été retenu. Il est encore nécessaire de préciser que dans le cas de ces projets, il s’agit essentiellement de documents textuels, que nous ne conservons que peu d’œuvres d’art et qu’il n’y a plus de droits sur les gravures du 18ème siècle, par exemple.

La solution Creatives Commons:
Les Creatives Commons nous ont paru intéressantes par leur définition claire et accessible des droits des utilisateurs. Une approche cynique pourrait consister à dire que recourir au Creatives Commons revient à reconnaître son incapacité à faire respecter un copyright et à poursuivre les infractions en justice. Les Creatives Commons semblent toutefois bien acceptées et respectées, peut-être parce qu’elles répondent de manière relativement adaptée aux besoins des internautes

La solution Public Domain Mark et Licence CC0
Désireux d’aller jusqu’au bout de nos objectifs de facilité d’usage et de gestion, nous avons souhaité placer nos images dans le domaine public. Deux licences Creatives Commons ont particulièrement retenu notre attention : La Public Domain Mark et la Licence CCO.
Se tourner vers ces licences implique cependant d’accepter une utilisation commerciale des images par des tiers. A nouveau, il est de toute manière  difficile de vérifier si les usages et réutilisations par le public respectent les limitations fixées. De plus, le service au public ainsi que la publicité entraînée pour l’institution par une large diffusion et utilisation des images sont un avantage certain. La réutilisation des images à des fins commerciales ne les empêchent pas de rester gratuitement disponibles au public sur leur serveur d’origine.

3)    Choix d’une licence
Une stricte application des licences aurait voulu que nous appliquions la Public Domain Mark pour les images d’objets déjà dans le domaine public et la licence CC0 pour ceux sur lesquels subsistaient des droits que nous possédions et que nous désirions libérer. Dans un soucis de simplicité, nous avons de décidé de mettre ces deux catégories de documents sous la Licence CC0. Ce choix vise à simplifier l’utilisation des images pour les internautes et à simplifier également nos processus. Se poser la question de l’application de la Public Domain Mark ou de la Licence CC0 à la création de chaque image n’est pas possible dans le cadre de processus largement automatisés. Cette solution provoque certes une redondance pour les documents qui appartiennent déjà au domaine public mais permet de libérer les autres documents. A l’inverse, signaler des documents non libres de droits comme étant dans le domaine public aurait été erroné.

Au final nous aurions voulu pouvoir indiquer à nos utilisateurs que l’ensemble de nos images étaient libre de droits et placées sous une licence unique (CC0). Toutefois, si la très grande majorité des images mises en ligne par nos soins peuvent être placées sous cette licence, quelques séries et documents isolés devront faire exceptions. Le recours au copyright ou à des licences Creatives Commons plus restrictives sera nécessaire au cas par cas.

Ainsi, comme il n’est pas possible de définir une licence unique au niveau du site pour l’ensemble des images, l’utilisation du champ IPTC “conditions d’utilisation” permet de lever le doute et d’informer l’utilisateur des conditions d’utilisation précises d’une image parmi d’autres.

Conclusion
Il reste finalement à informer le public de l’existence du champ IPTC dont la connaissance reste confinée aux professionnels du domaine. Les internautes n’ayant pas forcément le réflexe de consulter ce champ, il sera nécessaire de rédiger également une information générale sur le site internet.

Les indications relatives au droit d’usage des images seront également complétées par quelques recommandations générales n’ayant aucune force obligatoire, telles  que la mention du nom de l’institution, la manière de citer la référence ou le fait de ne pas utiliser ces images de manière inappropriée.

Les choix effectués ici ne sont pas définitifs et le débat reste ouvert. Un tel choix peut être éventuellement remis en cause par une décision juridique ou politique ultérieure. Nous nous proposons de rédiger un prochain billet sur le retour d’expérience pour compléter cette série sur les métadonnées.  

Références

Pour ceux qui seraient intéressé à pousser plus loin, nous renvoyons au

Archivistes, battons-nous pour conserver les dossiers personnels!

Par Anouk Dunant Gonzenbach

A l’heure de la tendance à vouloir détruire les données personnelles au nom de la protection de la vie privée, voici une petite réflexion sur le sujet.

Actuellement, la Suisse présente ses excuses officielles aux personnes qui ont été, enfants, enlevées à leur famille et placées de force dans des institutions ou des familles d’accueil entre la fin du 19e siècle et 1980. Ce placement se désigne aujourd’hui par le terme d’“enfances volées” . Ces enfants ont vécu de foyers en familles d’accueil dans des conditions le plus souvent terribles et leur enfance leur a été volée. Une exposition itinérante retrace cette histoire

Dans le cadre de cette exposition a eu lieu à Genève une table ronde sur intitulée “Sur les traces de son enfance”, axée sur l’importance de l’accès à son histoire et soulevant les questions suivantes: quelles mémoires interroger? Pourquoi se souvenir de son passé? Cet événement a réuni Jean-Louis Claude, un ancien enfant placé, Dr Dora Knauer, médecin-adjoint au service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent des hôpitaux universitaires de Genève, Olivier Baud, secrétaire général de la fondation officielle de la jeunesse, Chantal Renevey Fry, archiviste du département de l’instruction publique, de la culture et du sport et Gérard Bagnoud, archiviste du pouvoir judiciaire.

Jean-Louis Claude a témoigné de sa longue quête pour reconstruire, à travers les documents d’archives, les parties de son enfance qui lui manquaient. Les archivistes ont présenté les sources disponibles et le rôle de l’archiviste. Un des points capital à retenir pour nous est l’importance de l’accueil réservé aux personnes qui viennent consulter leurs propres dossiers aux archives après un  parcours écorché. Soyons humains et pas fonctionnaires obtus, professionnels, et surtout entourons-nous d’un professionnel (assistant social par exemple) qui recevra la personne dans une salle ad hoc pour ne pas qu’elle soit confrontée à des événements douloureux au milieu d’une salle de lecture publique.

Mais surtout, je voulais ici mettre en avant le point de vue du Dr Knauer, qui affirme que l’accès à ses dossiers est essentiel pour une personne qui veut reconstruire les parties manquantes de sa vie, notamment de son enfance. Ce processus de reconstruction, indispensable, doit être rendu possible. Les dossiers personnels doivent donc absolument être conservés.

Il faut vraiment faire comprendre à ceux qui mettent la protection des données en première priorité que le versement de documents dans les institutions d’archives protège ces documents d’une consultation inadéquate puisque leur accès est régi par des délais légaux. Une fois versés aux archives, ces données sont protégées mais conservées. Conservons donc les dossiers personnels, pour que les personnes concernées aient la possibilité d’y avoir accès!

Métadonnées intégrées aux images numérisées, partie 2: le choix de deux institutions publiques genevoises

Par Xavier Ciana, Emmanuel Ducry et Anouk Dunant Gonzenbach

Voici le second billet consacré aux métadonnées intégrées aux images numérisées.  Après un précédent panorama des principaux standards de métadonnées, celui-ci présente les choix effectués par deux institutions publiques genevoises en matière de métadonnées images.

Dans le cadre de la diffusion d’archives numérisées (de documents anciens dont les originaux sont conservés),  les deux objectifs principaux qui motivent l’intégration de métadonnées dans des images sont d’identifier la provenance des documents et d’informer sur les conditions d’utilisation.

L’identification ne pose pas de problèmes lorsqu’un document numérisé est consulté dans son contexte, en général sur le site web de l’institution qui l’a numérisé. Par exemple, lorsqu’un registre d’état civil est consulté sur le site d’une collectivité publique, l’interface de consultation servant d’outil de recherche fournit les informations nécessaire à l’identification du registre original ainsi que les éléments de contexte nécessaires à sa compréhension (provenance, date, etc.).

Mais que se passe-t-il lorsqu’un document – ou une partie de celui-ci – est extrait de son contexte puis republié? C’est un axiome du monde numérique : tout document qui peut être lu peut être copié et reproduit. En général, plus un document suscite de l’intérêt, plus il est reproduit et partagé. Et plus les copies sont nombreuses, plus la probabilité est forte que les informations qui accompagnaient le document lors de la publication initiale soient laissées de côté. C’est ici que les métadonnées intégrées jouent un rôle : lorsqu’une personne copie une image avec des métadonnées, elle reproduit également, même sans le savoir, des informations sur cette image.

Les métadonnées intégrées permettent donc de signaler l’institution qui a numérisé une image ainsi que d’identifier cette image sans ambiguïté (grâce à une cote ou un identifiant unique).  Sans informations d’accompagnement ni métadonnées intégrées, il  peut être extrêmement difficile de retrouver  le fonds ou  le dossier  d’origine d’une image isolée.

Le choix des métadonnées liées aux conditions d’utilisation feront l’objet d’un prochain billet.

  • Métadonnées images retenues par les archives d’Etat de Genève

Le choix de départ s’est évidemment porté sur les deux catégories de métadonnées liées aux images numérisées: les métadonnées  Exif et les métadonnées IPTC.

IPTC
Ce type de métadonnées sert en premier lieu à identifier l’institution et à gérer les droits d’utilisation. Les noms du pays, du canton et de l’institution qui met à disposition ses images et qui conserve les originaux est indispensable pour leur identification. En revanche, s’il est prévu de mettre à disposition les images pendant une longue durée, les métadonnées susceptibles de changement sont peu intéressantes à compléter (par exemple l’adresse web ou email de l’institution). Une recherche sur le nom d’une institution permet de retrouver facilement ces informations susceptibles de changer régulièrement.

On constatera qu’aucune cote ou identifiant unique ne figure par parmi ces champs. Dans le cas de ce projet, cette information apparaît uniquement dans le nom du fichier. Ce n’est peut-être pas une solution idéale, mais intégrer la cote dans les  métadonnées IPTC aurait nécessité un post-traitement qui devait être évité dans le cadre de ce projet.

EXIF
Le cas des métadonnées EXIF est un peu particulier. Ces métadonnées techniques relèvent en définitive plus de la conservation à long terme que de la diffusion. Toutefois, tous les appareils d’imagerie numérique produisent ces métadonnées.  Faut-il les conserver ou les supprimer ? Leur taille étant négligeable en regard du poids des images, il a été décidé de les garder. Mais quelles métadonnées EXIF sélectionner parmi le vaste panel proposé par ce modèle ? Quelques contacts menés auprès de diverses institutions ont démontrés des pratiques assez aléatoires. Généralement, on se contente des réglages installés par défaut sur la machine. La question est d’autant plus difficile que l’on entre dans un domaine technique qui devient vite pointu et avec lequel les photographes ont souvent plus d’affinités que les archivistes.

Pour répondre à cette question, la norme américaine Z39.87 “Data Dictionnary – Technical Metatata for Still Image”, qui offre un jeu de métadonnées pour la gestion tout au long du cycle de vie des images “pixellisées” (bitmap ou raster), a servi de point de départ. Cette norme n’est d’ailleurs pas sans lien avec le modèle PREMIS, ce qui est intéressant dans le cas d’une éventuelle réutilisation de ces métadonnées internes. A partir de là, une table d’équivalence entre la version “trial 2002” de cette norme et les spécifications EXIF 2.2 a été utilisée pour identifier  les champs permettant de répondre aux exigences Mandatory (M), Mandatory if Applicable (MA) ou Recommend ® de Z.39.87. Attention, il n’existe pas systématiquement un champ EXIF pour répondre aux exigences de la norme. Certains champs retenus peuvent ainsi ne pas être renseignés. La norme n’est donc pas entièrement respectée, mais on s’en rapproche le plus possible. A partir de là, un jeu de métadonnées techniques minimales a été choisi à l’aide des champs EXIF.

Métadonnées retenues:

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  • Métadonnées images retenues par les archives de la Ville de Genève

XMP
Un des principaux choix à effectuer est le standard à utiliser pour intégrer les métadonnées (IPTC, Exif ou XMP). XMP a été retenu pour les avantages que présente ce format (basé sur XML et RDF, extensible, standard récent) mais également car c’est le seul des trois standards qui permet d’intégrer des métadonnées dans des fichiers qui ne sont pas des images, notamment des PDF. Dans le cadre d’un projet de numérisation, XMP rend possible l’utilisation des mêmes éléments de métadonnées quel que soit le type de fichier produit (JPG et PDF par exemple).

Dublin Core
A l’intérieur d’XMP les métadonnées peuvent être exprimées à l’aide de différents schémas (IPTC Core, Dublin Core, schéma photoshop etc.). Il est donc nécessaire de faire des choix parmi ces standards. Un nombre limité d’éléments Dublin Core a été retenu car ils semblaient bien répondre aux objectifs de base (identifier les images et donner le statut juridique).

Métadonnées retenues:

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Le jeu de métadonnées Dublin Core est assez central dans XMP, en effet les informations de description élémentaires sont souvent signalées à l’aide de ce schéma. IPTC Core s’appuie également sur certains éléments Dublin Core. Ainsi, plutôt que de créer un nouvel élément ad hoc  pour le titre d’une photographie, IPTC Core recommande l’utilisation de l’élément « titre » de Dublin Core (dc:Title). Puisqu’ils sont fréquemment utilisés, ces éléments Dublin Core sont plutôt bien reconnus et ils ont d’autant plus de chances d’être lus par les différents logiciels de visualisation d’images. Les nombreux logiciels qui reconnaissent les métadonnées IPTC Core seront donc capables d’afficher (au minimum) les éléments communs à Dublin Core et IPTC Core (voir ci-dessous).

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Références

  • Pour les réflexions qui ont mené à ces études et à la rédaction de ce billet, nous nous sommes aussi inspirés du blog S.I.Lex à lire et là.

Métadonnées intégrées aux images numérisées : partie 1

Par Xavier Ciana, Emmanuel Ducry et Anouk Dunant Gonzenbach

Lors d’un projet de numérisation de documents, il est nécessaire de se pencher sur la question des métadonnées images pour des raisons de gestion documentaire, de droits d’accès, de recherche, d’identification du document, etc.

La problématique abordée ici concerne la numérisation de documents ou registres patrimoniaux à des fins de diffusion. C’est un point qu’il vaut mieux en effet aborder dès le début d’un projet de numérisation. Dans le cas présent, il s’agit d’un projet qui a débuté en 2006 et à cette époque, nous n’avions pas imaginé normaliser ces métadonnées. Ce besoin s’est ensuite fait ressentir et c’est pourquoi nous proposons aujourd’hui cette réflexion.

En Suisse romande, il n’y a pas d’harmonisation des pratiques concernant les métadonnées liées aux images numérisées diffusées en ligne par des institutions d’archives. De plus, on constate que la littérature professionnelle sur le sujet du point de vue archivistique n’est pas complètement aboutie.

La question de ce type de métadonnées sera abordée en 4 billets:

1. Panorama des principaux standards en matière de métadonnées intégrées aux documents numérisés (ci-dessous)
2. Liste des métadonnées retenues par deux institutions publiques genevoises dans le cadre de leurs projets de numérisation
3. Le choix du droit d’utilisation des images
4. Retour d’expérience par rapport à ces choix

LES STANDARDS DES METADONNEES
Les trois standards majeurs en matière de métadonnées intégrée aux images sont :

IPTC-IIM
L’IPTC (International Press Telecommunications Council) développe au début des années 1990 l’Information Interchange Model (IIM), qui est une structure et un jeu d’attributs de métadonnées applicable à des fichiers texte, des images et d’autres types de média. En ce qui concerne les images, les attributs prévus par le modèle IPTC-IIM comportent par exemple : le créateur, le titre, la date, des informations géographiques (pays, région, ville) ou des éléments de description (mots-clés, légende). Au milieu des années 1990, les logiciels d’Adobe – notamment Photoshop – ont permis d’intégrer ces éléments directement dans les fichiers images. Cette façon de faire a dès lors connu un large succès, de nombreuses images ont été « augmentées » de métadonnées et aujourd’hui encore, beaucoup de logiciels de visualisation ou de retouche photographique permettent d’afficher et de modifier ces informations. Par commodité de langage, celles-ci sont généralement appelées « métadonnées IPTC » ou « en-têtes IPTC / IPTC headers ».
A l’heure actuelle, cette manière d’intégrer  les attributs IPTC-IIM directement dans les images est en passe de devenir obsolète, en effet, les auteurs du modèle IPTC-IIM recommandent maintenant d’utiliser le standard XMP pour inclure ces attributs dans des fichiers.

EXIF
Etablie à l’origine par le Japan Electronic Industry Development Association (JEIDA), l’Exif (Exchangeable image file format) est une spécification de formats de fichiers pour les images et sons produits par les appareils photographiques numériques. Cette spécification repose sur des formats existants (tels que JPEG et TIFF pour les images ou RIFF WAV pour les fichiers audio), et y ajoute des balises de métadonnées. Les métadonnées Exif sont typiquement générées automatiquement lors de la création d’une image, c’est-à-dire par l’appareil photo au moment de la prise de vue. La très grande majorité des métadonnées Exif sont techniques, il s’agit d’éléments tel que la taille de l’image, la résolution, la compression ainsi que des données concernant la prise de vue : la date, le temps de pose, la distance focale, l’utilisation d’un flash,  ou encore la position GPS de l’appareil. Le grand avantage des métadonnées Exif est l’automatisation : la plupart des appareils photographiques numériques (notamment les smartphones) créent des données Exif dans les images, même sans aucune intervention de l’utilisateur. De plus, les métadonnées Exif sont largement reconnues et peuvent être lues et affichées par un grand nombre de logiciels de traitement d’images et ceux-ci conservent généralement les données Exif lors des modifications successives des fichiers. Enfin certains sites web exploitent également de manière automatique les métadonnées Exif présentes dans les images, notamment les coordonnées GPS. 

XMP
En 2001, Adobe introduit l’ “Extensible Metadata Platform” (XMP), un standard basé sur XML  et RDF, qui permet d’intégrer des métadonnées dans plusieurs formats de fichiers (TIFF, JPEG, JPEG 2000, PDF, PNG, HTML, PSD etc.). XMP est extensible et peut donc accueillir n’importe quel type de métadonnées du moment que celles-ci sont exprimées en XML. Dès l’origine, XMP incorpore un certain nombre de standards de métadonnées, un des plus importants étant certainement Dublin Core, qui permet d’accueil des métadonnées élémentaires tel qu’auteur, titre, identifiant, date ou encore des informations sur les droits d’auteurs du document. « IPTC Core » est un autre des schémas majeurs inclus dans XMP, il permet d’utiliser les attributs du modèle ITPC-IMM (décrit ci-dessus) à l’intérieur d’XMP. Le schéma « IPTC Core » fait  donc d’XMP le successeur officiel aux métadonnées IPTC.
Un dernier exemple de schéma pouvant être intégré à XMP est VRACore, un standard destiné à la description des objets ou œuvres d’arts représentés dans des photographies. VRACore n’est pas centré sur le fichier image, mais sur l’œuvre originale. Ce standard permet notamment d’en décrire l’auteur, la  taille, les matériaux ou techniques de création, ainsi que signaler le musée ou l’institution qui conserve l’objet original.  
Le champ couvert par les métadonnées XMP est donc très large et comporte aussi bien des informations de description, notamment via Dublin Core, que des données techniques ou encore des éléments de gestion de droits d’auteur ou de workflow.
L’intégration de métadonnées à des images grâce à XMP est intéressante à plusieurs titres : comme les données sont en XML/RDF elles peuvent être exploitées à l’aide d’outils standards. En outre de plus en plus de logiciels récents (notamment Windows 7) sont capables d’afficher et d’exploiter les métadonnées XMP. Enfin, si une institution à des besoins spécifiques, il lui est possible d’intégrer ses propres modèles de métadonnées dans XMP.

Cohabitation des standards
Techniquement, des éléments provenant des trois standards (IPTC-IIM, Exif et XMP) peuvent figurer dans un même fichier sans aucun problème.
Au niveau du contenu des métadonnées, les choses ne sont pas aussi simples : en effet certaines informations peuvent être répétées dans les trois standards, notamment des éléments de base tels que le créateur d’une image, sa date ou encore son droit d’utilisation. Si plusieurs standards sont utilisés simultanément, il est alors nécessaire d’assurer la cohérence des contenus afin d’éviter les disparités (par exemple un même fichier avec une date de création dans Exif et une date différente dans XMP).  Le Metadata Working Group, une coalition réunissant notamment Adobe, Apple et Microsoft, a émis des recommandations afin d’assurer la cohérence et la préservation des métadonnées lors de l’utilisation simultanée de plusieurs standards.

De multiples scénarios de cohabitation sont possibles : un même fichier peut par exemple contenir des métadonnées techniques issues du scanner dans Exif tandis que les métadonnées de description et celles relatives au droit d’auteur sont exprimées dans XMP. Comme on peut le constater dans le schéma ci-dessous, il est également possible de regrouper l’ensemble des données ITPC ou Exif dans XMP.
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CC-BY

Comment lire les métadonnées ?
Les métadonnées peuvent être à ajoutées à des images dans un but interne à une institution (description, processus de travail etc.), ou dans un but externe (enrichir les informations lors la diffusion). Quelles que soient les raisons initiales qui justifient l’intégration de ces informations à des fichiers images, il est évidemment souhaitable que celles-ci puissent être lues par les plus grand nombre de personnes qui vont consulter ou réutiliser ces images. Cette lecture dépend des logiciels utilisés pour visualiser les images. Si la majorité des logiciels de gestion et traitement de photographies sont capables de lire et de modifier les métadonnées intégrées, ce n’est pas le cas de tous les systèmes d’exploitation et logiciels généralistes. Windows XP utilise son propre système de métadonnées et de commentaires ad hoc appelé “Alternate Data Streams (ADS)” et peut uniquement lire un nombre restreints d’éléments Exif. Pour un utilisateur de Windows XP, la quasi-totalité des métadonnées intégrées dans une image seront donc invisibles. Le support pour lire les métadonnées « de base » (auteur, titre, date, droits, etc.) est meilleur dans les systèmes d’exploitation plus récents. Dans Windows 7, certains éléments des métadonnées issus des trois standards sont directement affichés dans l’explorateur ou figurent dans l’onglet « détail » de chaque fichier. Windows 7 est également capable de faire des recherches dans les métadonnées intégrées. Mac OS X permet lui aussi (dès la version 10.6) de rechercher dans les métadonnées et le logiciel « Aperçu » (utilisé par défaut pour ouvrir les images) affiche des éléments provenant des trois standards.
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Eléments de métadonnées affichés par l’explorateur Windows 7.
Le nom affiché ci-dessus sous « Auteurs » a été intégré à l’image grâce au standard XMP, dans l’élément Dublin Core « creator ».

Références

Considérations sur les fameux 5% de documents à conserver sur le très long terme

par Anouk Dunant Gonzenbach

Sur l’ensemble des documents produits par une institution, nous, les archivistes, évoquons toujours une proportion de 5% de documents à valeur juridique, politique, économique, historique, sociale ou culturelle qui doivent être conservés à long terme.

Ce chiffre a souvent été formulé lors de nos fréquentes réunions ces derniers temps avec les DSI. Il y a quelques semaines, nous avons réalisé que ce chiffre n’était pas du tout compréhensible. En effet, nos interlocuteurs imaginent que 5% du contenu de chaque SI ou GED doit être conservé.

Nous avons donc commencé à préciser que ce chiffre représente un pourcentage quantitatif et non qualitatif. Que les données de certains SI, par exemple les données relatives aux médailles de chien, seront entièrement détruites au terme de leur DUAL (durée d’utilité administrative et légale). Et que d’autres seront intégralement conservées (état civil, registre foncier).

A ce stade arrivent les journées archivistiques 2013 de l’Université catholique de Louvain-la-Neuve (introduites par une présentation époustouflante du monde des Cités obscures  et de la place des archives dans ce monde par François Schuiten et Benoît PeetersRêves d’archives– un moment magique).

Et là, le lendemain, Normand Charbonneau,  Directeur général de Bibliothèque et Archives nationales du Québec,  affirme haut et fort qu’il faut en finir avec ce 5% ! qu’il ne faut plus jamais en parler ! Car le message n’est pas compris. Il faut dire, je le cite: “on conserve ce qui doit être conservé”. En rappelant que l’évaluation est fondamentalement au cœur de notre profession.

Alors oui, je crois qu’il faut faire très attention et arrêter de parler de ces 5% avec des interlocuteurs non-archivistes. Vous en pensez quoi?

Au fait, êtes-vous en possession d’un chien d’archives? Il y en a dans les Cités obscures: il s’agit de chiens dressés à retrouver la place d’origine d’un feuillet ou d’un document qui s’est égaré. Le chien d’archives renifle ce document et sait exactement retrouver de quel fonds il provient.  

L’Etat de Genève se dote d’une politique de bonne gouvernance des documents électroniques

par Anouk Dunant Gonzenbach

Le 27 février 2013, une étape essentielle a été franchie dans le projet de gouvernance des documents électroniques de l’administration cantonale: le document-cadre Bonne gouvernance des documents électroniques entre désormais en vigueur.

Ce document a pour objet les documents électroniques pendant leur durée de vie au sein de l’administration, de leur création à leur destruction ou versement aux Archives d’Etat. Cette période regroupe les deux premiers âges des archives sous la forme d’une DUAL, durée d’utilité administrative et légale.
Voici un petit résumé de ce document qui est disponible, avec ses annexes, sur le site des Archives d’Etat de Genève.

Objectif de ce document-cadre
Il a pour but d’exposer les objectifs d’une bonne gestion des documents électroniques et vise également à démontrer les avantages liés à de bonnes pratiques ainsi que les risques encourus si celles-ci ne sont pas appliquées. Ce document présente le cadre légal et normatif ainsi que les éléments fondamentaux en matière de gestion des documents électroniques, et en décrit le processus général. Les exigences fonctionnelles et les directives techniques en sont exclues mais en constituent les annexes. Ce document ne se réfère pas à un outil existant.

LES POINTS FORTS

Objectifs et enjeux: une bonne gouvernance des documents électroniques répond aux quatre objectifs suivants, détaillés dans le texte:
–    rendre l’administration plus performante
–    faciliter le travail des collaborateurs
–    garantir la valeur légale des documents qui le nécessitent
–    répondre aux exigences légales

Cadre légal: Il est rappelé que le cadre légal en matière de documents électroniques provient de différentes sources :

•    le droit fédéral
•    le code des obligations
•    le droit cantonal (dont la loi sur l’information du public, l’accès aux documents et la protection des données – LIPAD)
•    les lois et règlements spécifiques aux métiers

Cadre normatif: Les principales normes ISO et eCH (standards suisses de cyberadministration) sont listées et décrites. Une annexe détaille et décrit l’ensemble des normes et standards relatifs au Records management et à  l’archivage électronique.

Métadonnées : Il est rappelé que les métadonnées permettent d’assurer la gestion du cycle de vie du document, de sa création à sa destruction, notamment en définissant une durée de conservation (en fonction des exigences administratives ou légales) et un sort final. Les métadonnées sont un des éléments permettant de garantir l’authenticité des documents, leur traçabilité et leur gestion technique dans les systèmes d’informations métiers. Le recueil de métadonnées “Etat de Genève”, qui contient 29 métadonnées dont 8 sont obligatoires pour tout nouveau SI ou GED dans l’administration, constitue une annexe.

Coffre-fort électronique: Tous les documents n’ont pas la même portée. Ils ne relèvent donc pas tous des mêmes exigences légales et, par conséquent, des mêmes obligations en matière de conservation. Les documents à valeur légale doivent être conservés dans un coffre-fort électronique qui garantit leur authenticité, intégrité et traçabilité, pour autant que les processus soient décrits et suivis.

Le partenariat entre les différents acteurs:  Le rôle des différents acteurs doit être défini et un partenariat fort mis en place entre le métier, les responsables informatiques, les archivistes de département, les Archives d’Etat et les juristes.

ETABLIR une politique de gouvernance des documents électroniques est une étape indispensable de tout projet de gestion des documents électroniques. C’est un sujet qui concerne tous les acteurs en présence (directions des systèmes d’information, juristes, archivistes, informaticiens); c’est une responsabilité partagée qui doit être assumée.
La Bonne gouvernance des documents électroniques au sein de l’administration a été validée par les organes suivants:

•    le comité Record Management de l’Association des archivistes suisses (AAS)
•    le comité Record Management du groupe eCH
•    le Centre suisse de coordination pour l’archivage à long terme de documents électroniques (CECO-KOST)

Education numérique

Petit cri du cœur au sujet de l’éducation numérique. En effet, à force de  mener des réflexions sur la gouvernance des documents électroniques et leur archivage à long terme, en tant que professionnelle de l’information et en tant que parent, pour moi il tombe quand-même sous le sens qu’il faudrait commencer par éduquer les enfants à la chose numérique.

Quand on pense enfants, on pense dangers des réseaux sociaux, mauvaise utilisation d’internet et contrôle parental. Mais il n’est pas possible ni souhaitable de contrôler tout ce que font nos enfants, comme pour les autres choses de la vie. Il est donc plus pertinent d’éduquer les enfants au bon usage du web et de les responsabiliser.

Comme pour la sensibilisation à l’environnement par exemple, on peut aussi présenter les choses de manière positive. Internet est un outil génial pour autant qu’on l’utilise correctement. D’où l’éducation numérique et l’éducation à l’identité numérique.

Or en Suisse et à Genève, ce sujet n’est pas du tout abordé à l’école. Cela fait deux ou trois ans que je réfléchis à la question et je suis entièrement d’accord avec le professeur Jean-Henry Morin (Université de Genève) dont j’ai fait la connaissance lors d’un cours et qui résume la situation en ces termes : il manque un portage politique de la chose numérique au niveau national. Nous avons un déficit de stratégie numérique, et cela dès la petite enfance.

Pour moi, l’éducation à internet peut s’envisager sous les axes suivants :

  • ce qu’est le web
  • comment effectuer une recherche sur internet ; comment traiter l’information trouvée
  • qu’est-ce que sont les réseaux sociaux, comment se comporter sur les réseaux sociaux
  • comment publier du contenu (site, blog) : aspects techniques et processus
  • les jeux virtuels
  • l’identité numérique / la protection des données

Je reviendrai régulièrement sur ce sujet qui est à la croisée de la vie professionnelle et privée, en espérant présenter un projet d’éducation numérique dans une école.

En attendant, voici un petit film belge sur l’identité numérique (Merci Jean-Henry Morin !): Dave le voyant aux pouvoirs paranormaux

Journée d’étude Protection de la vie privée / archivage électronique, Bruxelles, 28 janvier 2013

Par Anouk Dunant Gonzenbach

La  journée internationale de la protection des données personnelles – Privacy Day, qui a lieu le 28 janvier de chaque année, a pour but de sensibiliser les citoyens, les organismes publics et les entreprises à la question de la protection des données personnelles. Cette journée commémore la signature, par le Conseil de l’Europe, de la Convention pour la protection des personnes à l’égard du traitement automatisé des données à caractère personnel, le 28 janvier 1981. La Commission vie privée (Belgique), créée suite à l’entrée de la Loi vie privée  le  8 décembre 1992, a organisé pour son 20e anniversaire, le jour du Privacy Day, une journée d’étude consacrée à l’archivage électronique.

A la salle des Congrès de la chambre des représentants à Bruxelles, neuf conférenciers  ont mis en lumière, sous des angles différents, les rapports entre protection des données personnelles, transparence et archivage électronique. Je voudrais résumer et partager ici quelques points de cette journée.

Le Prof. Patrick Van Eecke, avocat, Université d’Anvers, a rappelé que malgré le développement des réseaux sociaux et la tendance des citoyens à exposer leur vie sur le net, il n’est pas vrai que la protection de la vie privée s’estompe. Au contraire, les règles se renforcent. Il précise que les archivistes et les juristes doivent accorder leurs objectifs: la préoccupation première des archivistes est de garantir la lisibilité et l’authenticité des documents. Pour les juristes, il est nécessaire qu’un contrat conclu par voie électronique et pourvu d’une signature électronique valable en droit soit opposable, autrement dit que la validité juridique de la signature électronique soit garantie dans le temps, ce que la migration de format sans autre précaution ne garantit pas. Parmi les règles d’or se trouve celle de la formation des archivistes en matière de protection des données personnelles: les collaborateurs en contact avec des données personnelles doivent recevoir une formation en la matière. Il a également mis le doigt sur l’importance du Service Level Agreement (SLA) dans la relation avec un tiers-archiveur. Enfin, il faut toujours se méfier des aberrations si courantes dans les processus les mieux réglés, par exemple maîtriser au mieux la gestion d’un système d’information et ses droits d’accès mais stocker les bandes de backups dans une cave non surveillée…

Lors de sa présentation sur la problématique de l’archivage des e-mails, Jean-Marc Rietsch, président de FedISA (Fédération européenne de l’ILM du stockage et de l’archivage) a introduit le terme de dématique, qui est pour moi une notion nouvelle. Pourquoi utiliser ce terme? Selon lui, le terme dématérialisation est source de confusion, car il renvoie à la notion de numérisation et de scanner. Or la dématérialisation va plus loin, puisque ce sont les processus-métier eux-mêmes qui sont dématérialisés. Il faut donc  entendre  dématique selon la définition suivante: dématérialisation des supports, des échanges et des processus.

Nous avons découvert lors de cette journée la spécificité du Luxembourg en matière d’archivage électronique. En effet, le Luxembourg possède une législation sur l’archivage électronique depuis 25 ans, permettant notamment aux entreprises de dématérialiser certains documents. Mais il semble que cette législation ait été prématurée et a échoué car il était trop tôt pour les entreprises de procéder ainsi. Le Luxembourg prépare maintenant une réforme ambitieuse de son cadre légal sur l’archivage électronique, qui a pour but de démocratiser et simplifier l’accès à l’archivage, d’assurer une véritable reconnaissance aux archives, de dynamiser et encadrer le marché de l’archivage et de contribuer à faire du Luxembourg le coffre-fort numérique de l’Europe. Le président de FedISA Luxembourg, Cyril Pierre-Beausse, a présenté la future organisation du marché de l’archivage: il s’agit tout d’abord de créer le statut PSDC (prestataires de services de dématérialisation et de conservation). Ces prestataires devront ensuite être certifiés par l’Etat. L’objectif est qu’il y ait une véritable présomption de conformité à l’original des archives réalisées par un PSDC, et qu’ainsi il n’y ait pas de possibilité pour le juge d’écarter un document parce qu’il se présente sous forme numérique, ni de faire prévaloir un original papier. Voir le Livre Blanc de FedISA Luxembourg sur le coffre-fort électronique.

Les Archives de l’Etat en Belgique  étaient représentées par Rolande Depoortere et Sébastien Soyez, qui ont présenté l’archivage électronique à l’épreuve des législations “vie privée” et “archivistique” en analysant les archives électroniques selon les fonctions archivistiques (description et classement, sélection, transfert, conservation et communication).

La journée s’est conclue par une réflexion “qui interpelle” au sujet des archives numériques de la presse et du problème de la conciliation entre le devoir de mémoire et la vie privée. Philippe Nothomb, conseiller juridique du groupe de presse belge Rossel, est régulièrement sollicité par des personnes désirant faire retirer une information les concernant ou y apporter une rectification (et lorsqu’il part en vacances, il semble que ces personnes en profitent pour contacter directement les journalistes, en l’absence du conseiller juridique, pour leur mettre la pression afin qu’ils retirent ou modifient des articles les concernant….). Les éditeurs de presse veulent préparer un texte de loi qui permet de préserver intégralement en ligne les contenus d’archives de presse en proposant aux personnes physiques et morales deux droits:  un droit de rectification numérique, qui sera liée en ligne à l’article contenant une inexactitude de fait, et un droit de communication numérique, qui permettra de demander une insertion gratuite (en cas par exemple de décision de non-lieu, d’acquittement, de réhabilitation, etc.). Est-ce réalisable? Qui vérifiera les faits? La question peut plus largement s’étendre aussi aux médias en ligne qui modifient continuellement leur contenu et qui publient en flux continu.

Une de mes conclusions à cette journée est qu’il nous appartient à nous, professionnels de l’information, d’appliquer les lois en matière de protection des données personnelles, de nous former et de mettre en place les bonnes formations, de travailler de manière interdisciplinaire (comme l’a mis en évidence Marie Demoulin, chercheuse au Crids  et spécialiste de l’archivage électronique “légal”, qui a ouvert cette journée d’étude). De ne pas oublier d’inclure dans les acteurs fondamentaux de l’archivage électronique les juristes (que l’on oublie peut-être souvent d’intégrer dans nos groupes de travail, focalisés comme nous les sommes sur les responsables IT). Mais ne faudrait-il pas aussi se former tous, en tant que citoyens, à prendre avec recul les informations qui se trouvent sur internet, comme les sites de presse, plutôt que de mettre en place des systèmes compliqués de droit à la rectification (je parle bien là pour les sites de la presse et non de diffamation sur les réseaux sociaux contre laquelle il faut continuer à se battre)?